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16 July 2021
L’enquête en France sur Riad Salamé, gouverneur de la banque centrale libanaise, confiée à des juges d’instruction

Le Parquet national financier, qui menait depuis fin mai une enquête préliminaire, a ouvert le 2 juillet une information judiciaire contre X pour « blanchiment en bande organisée » et « association de malfaiteurs ».

 

Il s’agit d’une nouvelle étape importante dans une affaire emblématique de la crise économique au Liban. Les investigations ouvertes en France sur le riche patrimoine en Europe de Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban, ont été confiées à des juges d’instruction anticorruption parisiens, a annoncé vendredi 16 juillet le Parquet national financier (PNF).

Le PNF a ouvert le 2 juillet « une information judiciaire contre X des chefs de blanchiment en bande organisée et association de malfaiteurs ». Ce dernier menait depuis fin mai une enquête préliminaire à la suite de deux plaintes déposées par des associations contre M. Salamé et son entourage, également visés par des investigations en Suisse et une plainte au Royaume-Uni.

 

Les juges d’instruction du pôle financier du tribunal de Paris désignés dans ce dossier bénéficient de pouvoirs d’enquête plus étendus, notamment en matière de coopération internationale ou d’éventuelles saisies de biens des suspects. Les associations plaignantes bénéficieront aussi d’un accès aux investigations et pourront solliciter des actes d’enquête auprès des magistrats.

« Blanchiment de sommes gigantesques »

« Nous appelions de nos vœux l’ouverture d’une information judiciaire qui nous permettra d’avoir accès au dossier », a réagi Pierre-Olivier Sur, avocat de Riad Salamé, qui « conteste les faits dans leur globalité ». Cette procédure judiciaire a pour point de départ les plaintes déposées en avril à Paris par la fondation suisse Accountability Now, d’un côté, et, de l’autre, par l’ONG Sherpa et le Collectif des victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban, constitué d’épargnants spoliés dans la crise qui frappe le pays depuis 2019.

« C’est tout un mécanisme systémique d’évaporation et de blanchiment de sommes gigantesques qui va être mis au jour », ont pour leur part réagi William Bourdon et Amélie Lefebvre, avocats de Sherpa et du collectif.

 

Les investigations françaises, parallèles à celles menées depuis plusieurs mois en Suisse, doivent notamment permettre d’éclaircir la provenance du riche patrimoine immobilier de M. Salamé, figure désormais honnie par son peuple à mesure que le pays s’enfonce dans la pire crise économique de son histoire.

Plusieurs de ses proches, en particulier son frère, son fils et son neveu, sont également visés par les associations. Elles demandent aussi d’examiner les responsabilités des intermédiaires et des banques impliquées dans la mise en place des complexes montages financiers internationaux autour de ce patrimoine.

Riad Salamé, 71 ans, s’est défendu à plusieurs reprises dans les médias, estimant être le « bouc émissaire » de la crise économique. Il affirme avoir fait légalement fructifier le patrimoine de 23 millions de dollars (19,5 millions d’euros) qu’il détenait en 1993, au moment de sa prise de fonctions comme gouverneur de la banque centrale. Ce patrimoine provenait, selon lui, de deux héritages et des revenus perçus lorsqu’il travaillait pour la banque d’affaires Merrill Lynch, à Beyrouth et à Paris. 

(le Monde)